Enquête. Alcool, tabac, cannabis... Une étude réalisée
sur 27 000 ados dresse un atlas inédit de la France.
Drogues : les jeunes brouillent les clichés
mercredi 06 juillet 2005 (Liberation - 06:00)
il y avait les enfants des corons accoudés au comptoir
dès l'aube, les Lorrains cueilleurs de champignons
hallucinogènes, les jeunes des cités sous ecstasy et
les petits Bretons à l'abri de tout ça. Ces clichés
vont voler en éclat. Les épidémiologistes ont épluché,
région par région, les résultats d'une enquête sur
l'usage des substances psychoactives à la fin de
l'adolescence. Une étude réalisée en 2002 et 2003
auprès de 27 000 jeunes âgés de 17 ans. Ils ont été
surpris. «Les zones géographiques les plus
consommatrices ne sont pas celles qui présentent des
profils sociologiques, économiques et culturels les
plus dégradés, comme on aurait pu se l'imaginer»,
s'étonne François Beck, coauteur de cet Atlas régional
de consommation des produits psychoactifs des jeunes
Français (1).
Sobre Ile-de-France. Ils s'attendaient à trouver une
surconsommation de substances psychoactives dans les
milieux urbains et dans les banlieues. Pas du tout.
«Lorsqu'on creuse, on s'aperçoit qu'en banlieue, on
consomme moins qu'à Paris, et qu'en Ile-de-France on
consomme moins que dans les autres régions», continue
François Beck. Moins d'alcool, «peut-être parce que
l'Ile-de-France compte une grosse proportion de jeunes
de religion musulmane, même si cela n'explique pas
tout». Et moins de tabac, peut-être «parce que cette
région est proche des centres de décisions en santé
publique et peuplée de cadres supérieurs plus
sensibles aux problèmes de santé que d'autres», ajoute
Stanislas Spilka, coauteur de l'étude.
Ils pensaient trouver des ados grands buveurs de
bières et précirrhotiques dans le Nord-Pas-de-Calais.
Ils se sont aperçus que les jeunes y buvaient moins
que dans les autres régions. «La consommation d'alcool
chez les jeunes du Nord est sans commune mesure avec
ce que l'on observe pour les adultes», note Stanislas
Spilka. Les champignons hallucinogènes ne tentent plus
les jeunes de l'Est mais s'expatrient à l'Ouest. Et
particulièrement en Bretagne, terre de prédilection
pour toutes les expérimentations. «Ainsi, elle allie
une forte consommation d'alcool, de tabac et de
cannabis et des expérimentations au-dessus de la
moyenne pour les champignons hallucinogènes et les
produits à inhaler», écrivent les auteurs.
Cannabis universel. Les jeunes des régions de la
façade océanique fument et boivent plus que les
autres. Les ados franciliens s'intéressent de près aux
poppers (vasodilatateurs à sniffer). «Pourquoi un
intérêt des jeunes de cette région pour ce produit-là
? se demande François Beck. Nous n'avons pas encore
d'explication.» «Nous observons des spécificités
régionales, ajoute Spilka. Difficile de démêler les
influences culturelles des autres.» Seules certitudes,
quelle que soit la région de France, la consommation
de cannabis y est plus élevée que partout ailleurs en
Europe. Et, François Beck insiste : «Selon les
produits, il existe des contrastes forts entre les
régions. Sauf pour le cannabis. C'est un produit
transculturel qui fonctionne bien chez les jeunes.»
(1)
www.ofdt.fr/atlas.htmLes jeunes Bretons particulièrement concernés par l'alcool et le tabac (ya pas dkoi etre fiere...)
LE MONDE | 06.07.05 | 15h02 • Mis à jour le 06.07.05 | 15h02
L'observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT) devait rendre publique, mercredi 6 juillet, une étude sur l'usage régional des drogues et de l'alcool chez les jeunes de 17 ans. Baromètre exhaustif de ces comportements, elle repose sur un questionnaire soumis à l'ensemble des adolescents présents lors d'une journée d'appel de préparation à la défense (JAPD), soit un échantillon représentatif de 31 309 jeunes, filles et garçons, scolarisés ou non. Usage au cours du dernier mois, régulier ou quotidien, ivresse ponctuelle ou fréquente : selon leur région d'origine, les jeunes Français présentent des comportements différents.
C'est la consommation d'alcool et l'expérience de l'ivresse, partout plus prégnantes chez les garçons, qui diffèrent le plus fortement. Les jeunes des Pays de la Loire sont, de loin, les plus gros consommateurs d'alcool, avec 20 % de "buveurs réguliers", soit deux fois plus que dans les régions du nord de la France, Picardie, Nord - Pas-de-Calais et Ile-de-France. Les "buveurs quotidiens" sont très minoritaires (1 %) chez jeunes de 17 ans. En revanche, près de la moitié déclarent avoir été ivres, au moins une fois, au cours des douze derniers mois et 7 % dix fois dans la même période. Concernant ces "ivresses régulières", quatre régions se distinguent : Rhône-Alpes, Pays de la Loire, Aquitaine (9 %) et surtout Bretagne (15 %).
Cette région se signale aussi très nettement par la consommation quotidienne de tabac, qui touche 48 % des jeunes de 17 ans (contre 39 % en moyenne, sans distinction entre filles et garçons). On y consomme aussi, plus fréquemment et régulièrement, du cannabis. Les jeunes bretons sont 16 % à en faire un "usage régulier", juste derrière ceux de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui sont 17,3 % à se déclarer consommateurs réguliers (contre 13 % en moyenne).
A l'inverse de la consommation d'alcool, très variable selon les régions, l'usage de médicaments psychotropes, prescrits ou non, est particulièrement uniforme sur le territoire. Ils concernent davantage les filles (16 %) que les garçons (5,2 %) et semblent juste un peu plus rarement utilisés en Auvergne et en Alsace, un peu plus fréquemment en Bourgogne.