AVIGNON (AFP) - La musique amplifiée fait des ravages sur l'audition des jeunes mais le phénomène reste mal connu et la réglementation qui permettrait de le combattre n'est pas toujours appliquée quand elle existe.
"Un lycéen sur dix présente un déficit auditif parfois irréversible", majoritairement dû à "un traumatisme sonore lié à l'écoute de la musique amplifiée", a rappelé la présidente du Conseil national du bruit (CNB), Marcelle Ramonet, aux 4èmes Assises nationales de la qualité de l'environnement sonore qui ont pris fin jeudi à Avignon.
La musique amplifiée sort des baladeurs, micros, hauts parleurs ou baffles et fait fureur dans les discos, les soirées techno et les rave parties.
La nature des lésions constatées dépend du sujet ainsi que de la longueur et de la fréquence de l'exposition, souligne le dr Philippe Ritter, médecin de santé publique et membre du CNB, un organisme consultatif placé auprès du ministère de l'Ecologie.
Parmi les principales victimes figurent des adolescents enchaînant les sorties en discothèques après des activités bruyantes durant la journée. S'ils ont eu des otites répétées pendant leur enfance, ils sont des candidats tout indiqués pour une surdité précoce.
Les jeunes en apprentissage omettent souvent de porter leur casque, en mécanique par exemple pour "mieux entendre" le bruit du moteur, observe Dominique François, ingénieur à la DDASS de la Dordogne (Direction départementale des affaires sanitaires et sociales).
"Les expositions sonores les plus délétères en termes de santé publique et de pertes de sensibilité auditive sont les concerts de groupes, les discothèques et les baladeurs", écrivait l'AFSSE (Agence de sécurité sanitaire environnementale) en septembre dernier.
Et de citer une étude de 1994 sur les 18-24 ans montrant que "le risque de perte auditive est plus élevé avec les concerts rock qu'avec les discothèques" et "chez les porteurs de baladeurs utilisant l'appareil plus d'une fois par jour".
Rappelant le rapport de l'AFSSE, un membre de l'établissement public, Gilles Dixsault, a souligné à Avignon que "les déficits auditifs importants constatés chez beaucoup de jeunes", "souvent liés à des expositions importantes au bruit lors des loisirs", étaient encore "insuffisamment connus".
Un des meilleurs indicateurs pour les sujets masculins, l'audiogramme pratiqué sur les futurs conscrits, a disparu avec l'abolition du service militaire obligatoire, rappelle Emmanuel Bert du ministère de l'Ecologie.
Une des rares études sur le sujet a été menée en deux phases, 1993-94 et 1998-99, relève Nicolas Grénetier de la Direction générale de la Santé (DGS). Elle a donné des résultats identiques à cinq ans de distance.
Au total 6.199 audiogrammes ont été réalisés sur des élèves de seconde de Rhône-Alpes des trois filières (général, professionnel et agricole). Ils ont montré un déficit de 15 à 40 décibels (dB) sur les fréquences élevées (4.000 hertz) sur environ 10% de l'échantillon.
C'est une perte auditive dont on s'aperçoit rarement à 18 ans, explique M. Grénetier. Mais elle peut devenir irréversible et annoncer des troubles auditifs handicapants bien avant le 3ème âge.
Une échelle publiée par le CNB fixe à 120 dB l'apparition de la douleur due au bruit.
La puissance des baladeurs est plafonnée à 100 dB et celle de la musique en établissement clos à 105 dB. Cette dernière limitation est souvent violée et il n'y a encore aucune réglementation pour la musique amplifiée à l'extérieur.
afp (from TTC)